Échange Épistolaire : Cassandra Beauregard

La petite cléricale prit la plume. Ou plutôt reprit. Ses doigts s'étaient maculés d'encre, à force de livres écrits, et si d'autres auraient été las de rédiger, elle ne l'était guère. Elle eut une petite grimace, et une oeillade pour son bras couvert d'une brulure qu'elle avait sommairement drapé de bandages.

Certains en ville lui trouvaient peu du "Strauss", et pourtant. La plume était prise comme une arme pour régler une affaire "personnelle". Et pour l'aider en cette affaire, qui de mieux que cette collégienne nouvellement intronisée qui lui avait proposé son aide!

Citation :

Mademoiselle Beauregard, mes salutations et respects,

J'ignore si vous vous souviendrez de nos échanges d'hier, de cette promesse d'une correspondance. Mais en vertu de votre allégeance, vous n'êtes pas sans savoir que chaque mot a un pouvoir et je choisis en ce jour d'en respecter la portée et tout le pesant. Et de vous prendre au mot, littéralement.

Il se trouve qu'un phénomène sur lequel je suis tombée (ou qui m'est tombé dessus, c'est au choix) a suscité de ma curiosité. On dit que les fées, du moins ces fées de conte et de légende, sont des créatures bénéfiques. Or, dans une forêt de Bellac les contes se trouvent à mentir, et, peut-être est-ce attendu, ou peut-être est-ce hors du commun, mais les créatures féériques du bois attaquent les passants comme des brigands de grand chemin. Je me demande si à tout hasard elles n'auraient pas été affectées de quelque chose, pour gagner tant et tant en agressivité. Et je me demande si à tout hasard elles ne peuvent pas être pacifiées, d'une manière ou l'autre. J'ignore si l'affaire est de quelque intérêt, mais il est propre de s'y pencher. J'ai aussi remarqué la présence de feu follets, mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'entité nécromantiques. Je serais avide de connaitre vos théories sur le sujet, et votre perception du phénomène.

Dans l'extension de cet ordre d'idée, j'aimerais savoir s'il serait possible de faire examen de quelques brulures gagnées en cette rencontre, et idéalement me proposer un cataplasme qui aurait un peu d'effet. Les liards me font défaut mais je suis persuadée que nous saurions, entre gens d'intérêts communs, trouver un arrangement.

En l'espoir de lire votre réponse prochaine.
Puissent les Sept vous veiller, et l'aspect de l'Oncle inspirer vos études, d'ici notre prochaine rencontre.

Nonne Sydonia Strauss.

Nouvellement arrivée à la Capitale, la jeune initiée du Collège se serait attendue à tout, hormis une missive. D’abord prise de surprise en recevant le papier finement plié, sa curiosité s’était rapidement muée en inquiétude alors qu’elle dévalait son regard sur les mots couchés à son endroit.

Elle ne s’était alors pas fait prier pour y répondre au mieux de son savoir.

Citation :

Chère demoiselle Strauss,

Je suis touchée que vous ayez pensé à m’envoyer vos paroles. Au contraire, je n’ai pas oublié votre personne, ni la gentillesse certaine que vous avez démontré à mon égard lors de notre unique rencontre.

Cependant, permettez-moi de bousculer l’ordre des questionnements affichés dans votre lettre et de commencer par répondre à votre dernier point, puisque c’est cela qui me préoccupe d’abord. Dans l’attente de notre future rencontre, je vous suggère d’exercer sur votre brûlure un macérât de millepertuis. Bien que ce ne soit pas une pratique complexe, vous pouvez toujours attendre, si la douleur vous est supportable, de me rencontrer afin que je m’en charge. Si vous vous sentez confiante, je vous écris ici la recette ainsi que la marche à suivre :

1. Remplissez un bocal stérilisé de fleurs fraîches de millepertuis sauvages coupées en petits morceaux, sans les tasser. (Vous pouvez en trouver aisément dans la forêt Ouest, à la sortie de Valcoeur. Ce sont des fleurs à tiges longues aux pétales jaune vif de forme étoilée. Ne les confondez pas avec des pissenlits.)

2. Ajouter de l’huile de tournesol, assez pour couvrir l'entièreté des pétales.

3. Laisser « mariner » le tout plusieurs heures en venant l’agiter de temps à autre. Vous verrez, le liquide deviendra d’un sombre écarlate, comme le sang des mortels.

4. Filtrer ensuite la préparation à travers un linge propre. Tenter de garder le contenu au frais par la suite.

Vous n’aurez ensuite qu’à y tremper une compresse et bander votre brulure. Changer le bandage dès que la douleur se ravive ou dès que le tissu est asséché.

Pour ce qui est de votre questionnement sur les fées, c’est un domaine que je connais si peu qu’il fallut faire quelques recherches dans la bibliothèque. À l’inverse des récits que les jeunes filles se plaisent à entendre, les fées sont bien plus sauvages qu’on le laisse paraître, et, surtout, bien plus territoriales. Souvent protectrices de savoirs, elles gardent farouchement leur domaine. J’ignore s’il serait possible de découvrir leur dialecte et, éventuellement, de converser avec elles. De concert, nous pourrions peut-être bien travailler sur cette possibilité.

En ce qui concerne les feu follets, les avis sont aussi mitigés que la raison de leur présence. Beaucoup les perçoivent, moi y compris, comme des âmes de défunts ayant perdu la vie au cœur de la forêt, ou de marécages. Si certains sont pacifiques, d’autres font preuve d’une malignité sans borne, décédés dans de tristes circonstances ; abattus par des coupe-jarrets lors d’une escapade en boisé, par exemple.

Dans tous les cas, il faut faire démonstration de prudence lorsqu’un feu follet se présente à nous. Serait-ce pour nous prévenir d’un marais mortel à proximité ou encore tout simplement pour étancher leur soif de vengeance sur nous ? Au premier signe d’agression, il est de raison de les fuir.

Ce qui m’amène à me demander s’il n’y aurait pas quelques moyens pour aider ces âmes perdues à trouver le chemin vers la Lumière. Comme il s’agit probablement de votre champ d’expertise, je vous laisserai volontiers cogiter à ce sujet, si le cœur vous en dit.


Avec l’espoir que vous trouviez satisfaction de cette réponse,


Cassandra Beauregard

Lorsqu'on avait dit à la jeune nonne qu'elle avait du courrier, son expression s'était illuminée. Elle n'avait pas tardé de prendre la plume.

Citation :

Mademoiselle Beauregard, mes salutations,

Votre réponse fait l'effet de baume au coeur et je vous en remercie! Il fait bon de gagner une correspondante, et il me semble que cela m'aide à trouver (ou retrouver) mes repères que de prendre la plume pour par l'encre tisser les prémisse d'une amitié. Je prendrai votre conseil à coeur et m'affairerai à trouver les ingrédients que vous recommandez, ayant bon espoir que cela permette d'atténuer la brûlure, mais je risque de devoir reposer sur votre expertise pour le reste malgré la limpidité de la recette, je me connais, j'ai toujours été piètre cuisinière ou alchimiste, trop aisément distraite par songe ou discussion ou réflexion pour réussir en ces domaines.

Concernant les feux follets, je m'étais moi-même laissée dire qu'il eurent pu être rémanences d'âmes mortes (d'ou ma question concernant la nécromancie). L'endroit occupé par les fées et feux follets n'est pas un marais mais une clairière, j'ai vu là des arbres gigantesques, splendides, séculaires. La territorialité est donc motivateur sans doute... mais j'aurais pourtant espéré que les occupantes de l'endroit aient au moins un avertissement avant de chasser quelqu'un sans arme, hache, ou hostilité. Concernant leur langage, elles n'ont pas énoncé une syllabe. Existe-t-il quelque chose concernant le langage des fées au collège? Peut-on apprendre? Nous pourrions oeuvrer sur ce projet ensemble, car approcher seulement les feux follets sans s'attirer le courroux des fées semble impensable. Et pour renvoyer une âme au Père, du peu que j'en sais, il faut au moins comprendre pourquoi elle est en peine et rémanente en ce monde. Ce projet semble complexe, mais aussi très prometteur, et j'aimerais y oeuvrer avec vous.

J'ai également besoin de votre aide sur d'autres registres je le crains.

Je me demandais si vous accepteriez de vous faire mon point de contact afin de faire lecture de documents que je produis, aux fins d'approbation par le collège. Je crois que peu de scribes ont pris sur eux cette initiative, mais j'ai été toujours transparente concernant mes écrits et je serais heureuse de pouvoir les partager tant de main propre que par la bibliothèque. J'ai conscience que la Maitre comptait assigner cette tâche à quelqu'un, mais j'apprécierais si vous acceptiez de vous dévouer : la lecture ne semble pas vous faire reculer, et nous aurons excuses pour échanger d'autant plus concernant diverses idées.

Et j'ai également été confrontée à un nouveau phénomène : des orcs ont connu un regain d'activité sur les montagnes piémontaises. J'ai été trouver des documents au Piémont (à Dourivage) sur le sujet (que je dois encore trier, je vous dirai si j'y déniche quoi que ce soit de concluant) mais, j'aimerais savoir si vous accepteriez de visiter les archives du Collège afin de trouver des renseignements historiques sur les orcs du Piémont (activités passées, histoire, manières de les repousser, anciennes victoires ou défaites), mais aussi physiques concernant l'anatomie des orcs, leur potentielle faiblesse, et s'ils ont un attrait particulier pour les serpents de mer ou d'eau. J'ignore si ces créatures ont un semblant de culture, mais toute information semble bonne à prendre.

Prenons du temps pour discuter, qui aujourd'hui ou demain. Pensez-vous avoir le temps de me consacrer une discussion ce (lundi, 21h) si nous ne nous croisons guère avant?

D'ici là, puissent les Sept vous veiller, et l'Oncle vous inspirer.
Sydonia.

Citation :

Mademoiselle Strauss,

Merci de m’écrire à nouveau. Cette considération envers mes recherches et hypothèses me touche énormément. Il est toujours très agréable de se sentir utile, surtout lorsque l’on est fraîchement arrivé au cœur d’une ville inconnue.

Vous avez raison, la lecture est l’une de mes grandes passions, et je dévorerais tous les écrits qui me tomberaient sous la main, si je le pouvais. Votre plume étant des plus agréable à lire, j’aurais grand plaisir à vous aider pour que tous puissent profiter de votre sagesse et de votre savoir ecclésiastique selon leurs besoins. Bien entendu, je ne peux promettre que tout sera approuvé par les Maîtres du Collège, mais je doute qu’ils retroussent nez à des ouvrages si finement élaborés.

Pour ce qui est des problèmes d’orcs, et pour les fées, sachez que j’étudie presque sans relâche le sujet depuis que vous me l’avez apporté. Je vous enverrai une nouvelle missive, ou mieux, vous partagerez de vive-voix mes trouvailles lorsque j’aurai quelque chose d’intéressant sous les yeux. Sur le sujet, votre père m’a également écrit une missive pour mentionner ces bêtes immondes. Comme il semble de caractère coloré, je tâcherai de ne pas le décevoir en matière d’informations utiles pour son combat contre ces orcs.

Recevez, mademoiselle, mes amitiés,

Cassandra Beauregard,
Aspirante du Collège des Érudits

Citation :

Chère mademoiselle Beauregard,

Vos mots me réjouissent, et les ayant trouvé là sur le vélin a illuminé ma journée.

Je peux vous promettre, la lecture d'un abécédaire lié à une petite histoire (pour astuce mnémotechnique).

Ce n'est sans doute rien de ce qui atteigne le niveau des lectures attendues (et je peux vous assurer que je le relèverai) mais, lorsqu'on prend le temps d'apprendre à lire à des soudards, il faut trouver des solutions qui fonctionnent et je me dis que ce manuel pourra s'avérer utile aux cas les plus déses diffi intéressants. J'entend aussi vous envoyer, dans les jours prochains, la "Voie du Vagabond", un pendant de la "Voie du Guerrier" ou de la "Voie des Mages", qui sert de manuel de vocation étoffé.

Je suis ravie d'apprendre que mon père vous a écrit : j'ai fait part de votre besoin de trousse, comme de vos qualités de médecin, et d'office il a semblé empressé de vous rencontrer (et de vous fournir les trousses). Je n'ai pas caché votre aide en cette recherche sur les créatures à peau verte qui l'incommodent tant du côté de Sarsbois et je ne saurais lui en vouloir de vouloir s'abreuver à l'aulne de votre expertise. Soyez certaine : mon père peut parfois surprendre mais sous des dehors parfois rudes, il a le coeur fort généreux et bon. Ainsi que vous le disiez, fort sagement, l'autre jour : "Ah, les hommes".

J'ai bon espoir que nous pourrons nous croiser pour discuter -comme promis- de vive voix dans les jours prochains.

Avec amitié, et la bénédiction des Sept
Sydonia.

Sydonia Strauss a écrit:

L'Abécédaire du Soudard
Pour apprendre à lire dans la joie.

L'Alphabet :

A, a
B, b
C, c
D, d
E, e
F, f
G, g
H, h
I, i
J, j
K, k
L, l
M, m
N, n
O, o
P, p
Q, q
R, r
S, s
T, t
U, u
V, v
W, w
X, x
Y, y
Z, z

Mettre la Hache dans l'Alphabet - Conte des débutants

"Aaaaaaaaah" (A), de dire la première des lettres, à l'arrivée.
"Beh" (B)... comme bonjour, vint elle ensuite bégayer.
Ce qu'elle voulait dire, cette lettre, nul ne le "Sait" (C)
La comprendre était un lancer de "Dé" (D)
Alors pour répondre, c'est qu'on disait "Euh" (E)
Ou bien encore qu'on jurait Fichtre d'un "Eff" (F) qui n'avait rien d'Eff-usions de tendresse
Et tandis que la lettre se demandait "Mais qu'est-ce que "J'ai"" (G)
C'est plutôt à coup d'Hache (H)
Et dans le cri d'effoi d'un grand "Iiih" (I)
Que cette pauvre lettre malhabile "Git" (J)
Pour la Garde c'était un sacré "Cas" (K)
Et la Hache, "Elle" (L), elle se sauva
Être prise au collet, qui donc "Aime" (M) ça?
C'est plutôt la "Haine" (N) qui la motiva.
Elle s'en fut donc se percher en grenier, bien "Haut" (O)
Pour que la Garde lui fiche un peu la "Paix" (P)
Mais se sachant perchée en bordereau, et ne voulant vendre son "Cul" (Q)
Ou du moins, pas du temps de notre "Ère" (R)
Plaida pour que filer, on la lai"Sse" (S)
Et au Temple elle vint se réfugier, on lui offrit tasse de "Thé" (T)
Prêtre l'interrogea, sur ce qu'il y avait "Eu" (U)
Ne voulant s'expliquer, la Hache dit "Je m'en "Vais"" (V)
Et devant l'insistance elle jura : "Non mais vraiment, je m'en "Double-Vais"" (W)
Sur les explications, le prêtre pouvait tracer un "Ixe" (X)
Allant même jusqu'à le traiter d'"Igrais" (Y)
Et du prêtre de raisonner "Comment voulez-vous donc si vous vous sauvez que je vous "Z'aide"" (Z)